Chers régénérateurs du vivant,
Un des trois grands suivis après plantation, en plus de l’arrosage (les deux premiers étés) et du désherbage (qui s’atténue au fur et à mesure que la strate basse se développe), c’est la taille. Apprenons-en plus ensemble.
Tailler ou ne pas tailler ?
La plupart du temps, les arbres s’en sortent très bien sans taille, et souvent même mieux, car chaque coupe est une porte d’entrée potentielle pour les maladies — surtout lorsqu’elle est mal réalisée. Si nous taillons un arbre, c’est rarement pour lui, mais généralement pour nous : faciliter le passage ou la récolte, éviter un risque, améliorer la qualité des fruits…
Même gravement malades, les arbres peuvent vivre encore des dizaines d’années tout en rendant mille services : refuges pour la faune, capture de carbone, fertilisation du sol, régulation de l’humidité et de la température, participation au cycle de la pluie… S’il n’est pas près d’une structure risquant d'être abîmée (par exemple une maison) ou d'un espace très fréquenté, un arbre malade ne présente que peu de risques et ne mérite pas forcément un abattage ou une taille sévère. D’ailleurs, même mort, il reste un pilier pour la biodiversité. Pour en être convaincu, je vous recommande le passionnant livre La vie secrète des arbres de Peter Wohlleben, facilement commandable en librairie pour moins de 10 €.
Et tailler un arbre « trop grand » ? Pas beaucoup mieux. Un arbre adulte tend toujours vers une taille qui lui est propre. Pour éviter qu’il devienne trop volumineux, le vrai secret est de choisir la bonne variété au moment de la plantation. Si ce n’était pas possible, une taille douce et régulière sera préférable à des coupes drastiques et espacées.
Les trois tailles vraiment utiles

1. La taille des fruitiers
Les fruitiers, souvent sélectionnés depuis des millénaires, ont évolué à nos côtés. Ils peuvent avoir besoin d’un coup de pouce régulier pour bien fructifier. Dans mon approche, je concilie deux techniques : la taille douce et la taille de formation en axe.
La Taille douce
Taille annuelle, où jamais plus d’un tiers du houppier n'est retiré, pour éviter les grosses plaies et réitérations chaotiques, et garder l’arbre sain et productif. Elle a trois grands rôles.
Empêcher le porte-greffe de repartir (obligatoire si vous ne voulez pas perdre la savoureuse variété greffée)
Améliorer la qualité des fruits par :
- Eclaircissage de l’intérieur de l’arbre
- Suppression des branches basses ou empilées
- Suppression des branches sous arcure ou trop âgées
- Eclaircissage d’une partie des jeunes fruits
Améliorer la santé de l’arbre en :
- Evitant le frottement des branches qui susciteraient des plaies difficilement cicatrisables
- Allégeant les charges trop lourdes pour éviter la casse
- Supprimant les démarrages trop nombreux d’un même point, qui pourraient créer un bouchon de sève
- Evitant les fourches à angle fermé, sources de casses rarement cicatrisables et entraînant donc la mort de l’arbre
- Aérant la couronne pour limiter les maladies cryptogamiques
- Equilibrant la structure de l’arbre pour éviter casse ou déracinement
La formation en axe
Une taille plus drastique et technique, surtout pour les poiriers, pommiers, châtaigniers, et certains pruniers et cerisiers, sur les cinq premières années, pour structurer l’arbre et faciliter la récolte.
2. Le recépage d’épaississement
Un an ou deux après la plantation d’une haie, en fonction de sa reprise, on coupe les jeunes arbustes qui le supportent à ras.

Cette taille radicale peut paraître effrayante, mais les jeunes arbustes sont vigoureux et repartent plus fournis, formant ainsi un brise-vent et vue dense et efficace, et promettant une plus grande production de biomasse.
Et la taille d'entretien d'une haie ? Si vous avez planté une haie vive, adaptée à votre espace, et que vous avez assez serré vos plants et bien pratiqué la taille de recépage, vous ne devrez plus tailler votre haie. Sinon, vous vous retrouverez dans le même cas que lorsque vous essayez de réduire la taille d'un arbre trop grand...

3. La trogne
La trogne est une forme de taille traditionnelle, répétée toujours au même endroit. Elle peut remplir de nombreuses fonctions, mais tous les arbres ne la supportent pas.
Elle convient à la plupart des feuillus (mais pas à tous... n'hésitez pas à me demander conseil !) et à quelques rares conifères comme l’if, le Ginkgo biloba ou le pin sylvestre (à condition de laisser des rameaux latéraux capables de se redresser). Elle est indiquée dans cinq situations.
Créer des arbres AFI (Architecturaux, Fertilisants, Ingénieurs), utilisés notamment pour l'installation de forêt-jardins :
- Ces arbres, souvent pionniers, offrent temporairement un ombrage léger, et un microclimat moins venteux, pour accompagner le développement d’autres plantes (ex. arbres fruitiers)
- Au fur et à mesure de la croissance de leurs remplaçants, ils peuvent être trognés pour laisser la place. On en profitera pour laisser la matière organique coupée au sol afin d’augmenter sa fertilité
- Au bout d’un certain temps, on peut complètement les supprimer, mais les garder d’abord sous forme de trognes quelques années permet de mieux fertiliser et de réaliser une transition plus douce
En les taillant tous les 1 à 3 ans, produire à hauteur d’homme :
- Feuillage comestible (ex. tilleul à petites feuilles)
- Bois de vannerie (ex. saules)
- Fourrage
- Boutures
Produire du bois sans abattage
- En taillant tous les 3 à 10 ans : piquets, fagots, perches et bûches de chauffage
- En espaçant les tailles d’au moins 9 ans, pour les essences qui le supportent (platane, tilleul, frêne, peuplier noir…) : produire de grosses sections de bois
Créer rapidement des anfractuosités pour la faune : chouettes, mésanges, insectes…
Eventuellement gagner de la place dans les petits espaces (mais attention au suivi !)
Quand tailler ?
En Wallonie, la plupart des tailles se font de fin février à début mars, hors gel et grosses pluies.
Comme toujours dans la nature, il existe quelques exceptions :
- Amandier : janvier-février
- Cerisier à bois souple : juillet-août
- Prunier : dès novembre, mais il est particulièrement important d'être hors gel et humidité
- Noyer : mai-juin (formation) et hiver (entretien)
Et surtout… comment tailler ?
Parce qu'un coaching sera bien plus efficace qu’un long mode d’emploi, je vous propose de venir chez vous pour une visite de taille personnalisée, où je vous montre les gestes, vous explique comment lire vos arbres, et vous donne les clés pour effectuer les tailles futures en toute autonomie.
Au travers de l'asbl Semisto, nous donnons également régulièrement des formations d’introduction à la taille des arbres fruitiers.
Si vous ne souhaitez pas ou ne pouvez pas apprendre à le faire vous-mêmes, nous pouvons aussi réaliser tous ces types de tailles pour vous.
Un arbre à tailler ? Une palette végétale à adapter à votre terrain ? Ou simplement une question à me poser ?
Merci d’être des semeurs d’abondance et des amplificateurs de vie,
Christophe 🌳